vendredi 12 janvier 2018

Lézard de verre


Comme ces monstres des marécages dont les peaux s'arrachent pour pendouiller aux bras des dames. Les alligatoridés alanguis, impassibles, vous endorment de leur immobilité. Aucun cuir ne sera assez tanné pour résister à leurs crocs acérés. 
La peau craquelée par le froid, l'envie de la chair crevassée par les mois passés à oublier.

Comme ce lézard qui assure sa thermorégulation en balançant tel l'équilibriste son poids d'un appui à l'autre. Une danse séquentielle pour ne pas se carboniser les extrémités. 
La Technotronic de sa survie. Ses mouvements saccadés ouvrent sa voie dans le désert qui s'étend à l'infini, ou à l'éternité.
Insignifiant et disproportionné. Les dunes sont des montagnes mouvantes. De ces pics et monticules les vents envolent. 
Les grains de sable piquent tels des aiguillons rendant encore plus difficile sa progression. 
Le sommet ne s'envisage que graduellement, zieuter le haut du colimaçon, c'est flirter avec la désertion.







L'épine dorsale à fleur de membrane, quand le squelette reprend le jeu de ses articulations. La cambrure s'articule. Entre étirements et oscillations, douleurs et satisfaction. Redessiner sa musculature, assouplir encore et encore son corps.
S'étirer en visant le ciel, jouer les guerriers du soleil, danser avec des boules de feu immatérielles. Body Balancer, se raffermir et se sentir plus fort en pliant de toute sa souplesse.

Armure et écailles, bestiaire d'acier et bouclier protecteur d'épithéliales, barricadent l'intime pudeur. Quand les fortifications s'évaporent, l'impertinence vient dynamiter la muraille. 
Se réduisent les réticences, la cotte se fait limaille. 
Une page blanche dans de beaux draps. Brûlant et glacé à la fois. Le froid du métal et sa fusion. L'envie et le poison. Après l'affective désinfection, l'attraction. Foudroyée et froides suées. S'abandonner après élimination. Jouer avec le feu et marcher sur des oeufs de braise.






Vouloir en croquer vraiment, mais ne plus trop savoir comment, bouffer du silence à s'en faire péter les tympans. Imiter le volcan, sous les pierres masquer la fusion, le magma explosif et dégoulinant. Confiture incendiaire. 
Vouloir sa peau, sa chaleur, les rires, l'ivresse et se gaufrer de maladresses. 
Du déserteur au déviant, passer l'efface-poussière, de la déconfiture au ratatine-ordure, 
(Ah Gudule !) ET ... du Dunlopillo au wi-fi relationnel. 
Expéditif et très rapidement complaisant, du vent dans les voiles,  surfer sur les revers au progrès.






Rager de savoir à qui ces gouffres, à qui cette batterie, avancer jusqu'aux prochains torrents de mots qui raviront. Adversaire sapio du ping-pong verbal dans l'antre du Tuning et du bestial.

Scotcher de Gaffer le puzzle, susurrer en attendant, cramer les "si seulement", se mettre quelques taloches, fichue tête de pioche, stubborn un rien bornée. 
Chahutée de la carapace, refaire sa cuirasse. 
Faire comme l'égérie en combi, tu fight, et puisque c'est grave : souris ! 
Passer à autre chose, que le vide s'impose. Voir si Paris est si petit que la gouaille d'Arletty.








La ligne d'un point A à un point B préférer,
a ces triangulaires risquées. 
Aux dandys des lounges sur canapés,  
aux chasseurs de jazz sur Teppaz, 
aux kings de l'enfumage et de l'emphase, 
à mes références alambiquées.



Et sur des musiques endiablées ... enfin arriver à danser !



Ella Fitzgerald
"Ive got you under my skin"






The Lounge Lizards / Boris Vian / TCC 

////// acryliques et médiums.

mardi 2 janvier 2018

Just In Case

Frôlant des lèvres, caressant doucement, humant intensément. Le retour en arrière, la madeleine insoupçonnée, le trip au milieu de la volupté. J'étais là sans y être, intensivement présente, je dévorais ce moment, autant que cet échange. 
Pourtant, elle m'emportait, la Gitane Bleue et son relent de goût d'acier.

Encerclée, enchâssée, accrochée, entourant mes jambes à ses mollets. Bercée par la musique, embarquée dans la torpeur et la douceur, oubliant les après et les avants.
Le passé qui revenait titiller mes naseaux comme pour m'envouter davantage. La fragrance improbable de cette femme que j'ai tant aimée, ce modèle qui s'était évaporée.  A l'image des volutes de ses "sans filtre", sa tête s'était éclipsée ne laissant qu'un corps vide et déformé.




Ce qui m'ancrait là dans cet entre-deux, n'était pas empreint de nostalgie, ni de douleurs de la savoir partie. Cette réminiscence m'engageait à flotter, à me laisser aller. Comme je l'avais trop fait de mots. Il me fallait sans cesse y revenir, envoûtée par cet attrait tant labial que nasal. La douceur de cette langue qui s'amusait de la mienne, la fluidité de ses mains qui parcouraient mon échine.  Entourant sa bouche de parfums et de douceurs, l'accessoire pileux offrait plus d'un revers. Je l'attirais vers moi, l'agrippant sous les maxillaires, avalant les restes de fumée qui s'échappaient de ses lèvres.

Au matin, mêlés ; cafés, cigares cacaotés, restes de nos dégustations avinées et senteurs d'amants. Fugace et tenace à la fois, l'envolée sensorielle serait ma compagne pour quelques heures encore. J'embarquais pour une journée défalquée, hors du temps, entre l'intense fatigue d'avoir veillé sur son sommeil, et la légèreté de m'être laissée emporter par .... un mirage, un ectoplasme en devenir, par l'ivresse et cette déstabilisante tendresse.

Dans le métro avec sur les lèvres encore ces arômes, se pressait la foule pour aller au turbin. Tel l'Aladdin Sane dans sa bulle, je survolais les sales remugles des transports parisiens. Les tunnels me donnaient par intermittence à voir mon reflet. Le Rimmel plus très frais, la bouche à nu, les yeux de l'insomnie. Au milieu des quidams, embarquée dans mes pensées au centre de la rame.





Demandant à mon corps l'étirement et l'équilibre, la force et l'assouplissement, j'errais dans ce moment. Sentant dangereusement les rouages de cette machine infernale vouloir m'envoler. Nager à contre-courant serait ma bouée. Par peur de boire la tasse, à l'arrimage de mon Riva fantasmatique, je préférais prendre le large. Un sabordage en guise de sauvetage. Au contraire de quelques sommaires entrevues : panne de radar, erreur de GPS, le vin avait délié ma langue. Ma torpeur fut brève et je me murais dans le silence. Ecorchée pudibonde, l'effeuillage m'avait couté des plumes.





Fuyant volontairement, pour tenter de contrer l'irrépressible envie. Fermer les yeux me portait vers cette odeur de terre et d'acier. Effrayée par ce moment si improbable et me fragilisant. Hypnotisée récalcitrante. Les nuits uniques avaient cela de pratique, ludique, et hygiénique pour les sentiments. Les One Shot disparaissent sans bruit, ... so F.... easy. 
A l'impossible nul n'est tenu, mais de l'imprévu j'étais la cible. 

Silences et tourbillon d'après soupirs, dispersion, disparition. 

De ces heures restaient la douceur et l'intensité aussi. L'éphémère dégoulinait sur mon clavier et mes toiles, tout pour mettre les voiles, singer le pangolin et rouler loin ... Erreur de casting, mauvais teasing, fâcheux timing, ... il restait des points de suspension et mon tremblant sous pression. 

Et de ces tumultes anesthésiés, 
Et de ce tourbillon,
Et de ces envies, 
ne retenir que le joli.






Jeanne Moreau 
"Le tourbillon de la vie "